Altore

Ce fût une nuit presque bleue tellement il faisait noir. Dans un bon appart', nous nous décidâmes à briser l'omerta : la bouteille de whisky Altore, aussi lourde qu'une bouteille de butane, se vidant aussi rapidement qu'une paillote en feu, j'avisai un jour mon collègue d'éthylologie qu'il était temps de faire parler l'Altore avant que le flacon ne fût vide.

Quelle chataîgne nous ne reçument pas en goûtant cet improbable breuvage ! « Avec ça, on n'est pas au lit ! ». En effet, ce whisky distillé en Ecosse, est élevé en Corse par la société Altore près d'U Canale (historique ?) de Patrimonio, dans des fûts de Cap Corse, ce fameux apéritif à base de vin si chers aux compatriotes de Tino Rossi, seul alcool pouvant leur permettre de résister aux roucoulades du Rossignol insulaire.

Le résultat est sans appel : un nez herbacé aux notes de réglisse, de bois de santal, de miel de bruyère, de mélisse et de vin de noix qu'agrémente de manière revigorante des saveurs de chêne et de céréales. La finale, bien qu'un peu courte, s'accorde avec l'ensemble : chaleureuse et complexe à la fois. La bonne surprise que voilà, œuvre d'un travail sûr et pertinent qui vient démentir la réputation surfaite d'une propension de l'autochtone à laisser aller les choses…

Au terme d'un premier et dernier verre, ma copa n'était pas pleine mais la bouteille était vide… Une occasion pour lancer à mon coreligionnaire : « A-lonzo bistrot !! » Car il en est de ce whisky comme de son île de beauté d'origine, c'est qu'il possède un véritable goût de reviens-y. Le produit, comme les paysages du Monte Cinto sous un névet printanier, se révèle en somme bien addictif et vous laisse sur les lèvres et dans les sens un souvenir émouvant capable de faire vôtre le désir de hisser le drapeau à tête de Maure.

Arnaud
Ce soir-là...